C'est alors que je remarque un curieux
sifflement qui semble provenir d'une des armes. N'écoutant que mon courage, je rejoins précipitamment mes hommes au fond du trou...
Après quelques secondes, il semble bien que rien n'a explosé et que nous sommes toujours vivants. Le sous-officier m'explique
que le missile numéro un s'est décroché et est brutalement retombé sur le lanceur. Moi, je n'avais rien remarqué... Le problème
c'est que le système de mise à feu est conçu pour s'activer lors de l'accélération du départ... ou d'un choc
similaire. La question est maintenant de savoir si le choc a été assez violent pour armer le missile. Si c'est le cas,
il peut exploser à tout moment, me dit-on. Pour le savoir, il n'y a qu'une solution. Une personne doit aller seule connecter
un boîtier de contrôle sur la prise de lancement (appelée un "ombilical"). Il s'agit du connecteur auquel on ne touche qu'en
temps de guerre et qui est normalement couvert d'une "Shorting Plug" destinée à éviter un lancement intempestif. Selon la
procédure technique, vous l'aurez deviné, cette personne est l'officier de sécurité (moi, donc)... Après avoir réuni toute
l'équipe de l'autre côté de la butte de tir (on n'est jamais trop prudent), je m'approche du lanceur en déroulant derrière
moi le câble d'un téléphone de campagne. En effet, même l'émission d'un walkie-talkie pourrait causer une explosion, paraît-il.
Suivant les indications du responsable technique installé en sécurité dans l'abri blindé, je retire le couvercle sur lequel il
est écrit en rouge "Danger - Do NOT Remove". Ensuite, je branche une boîte-diagnostic munie de quelques loupiotes et d'un bouton
sous lequel un américain a jugé utile d'imprimer la mention "Press Here". Une seconde plus tard, une lampe verte s'allume,
c'est probablement bon signe. Le chef réparateur arrive alors avec tout un attirail pour "vérifier les tensions". Bientôt, il
confirme l'absence de danger et nous examinons les dégâts de plus près. En fait, le sifflement que j'ai entendu provenait du
gaz inerte dont les missiles sont remplis. Celui-ci s'est échappé d'une longue fissure dans le radome. Le missile est foutu,
on me dit qu'il coûte des centaines de milliers de dollars. Pas mal pour un premier jour de travail! La commission d'enquête
arrivée sur les lieux découvre rapidement la cause de l'accident. Le "Rotating Sector" (support rotatif) sur lequel le missile
reposait a basculé, causant le décrochement du missile. Normalement, cette pièce ne bouge que lors du tir mais son verrou était
défectueux. Suite à cette découverte, les lanceurs de tous les sites Hawk sont contrôlés. Seules quelques pièces s'avèrent
défectueuses. Il a fallu que ça tombe sur moi...