Ecoute électroniqueUne poignée d'hélicoptères du 239.OGVP d'Oranienburg (1), une unité directement subordonnée au commandement de l'état-major de la 16.VA, avait été mise à disposition du Ministerium für Staatssicherheit (MfS - Ministère pour la Sécurité de l'Etat, mieux connu sous l'acronyme de Stasi) dans le cadre des opérations portant le nom de code RELAIS II entre 1983 et 1989. Ces appareils étaient équipés de divers appareillages d'écoute radio multi-bandes dont les antennes étaient situées sur le flanc avant droit des machines concernées. Si l'équipage était soviétique, le personnel en soute était allemand et composé d'un interprète, d'un photographe et de deux opérateurs radio. Les vols de renseignement consistaient à effectuer au départ d'Oranienburg, une base située quelques kilomètres au nord de la zone d'occupation française de Berlin, un parcours tout autour des frontières de Berlin-Ouest, dans le sens des aiguilles d'une montre. Outre le renseignement électronique, ces vols offraient également l'opportunité de photographier par le hublot arrière droit les installations alliées sensibles, telles que les casernements ou encore les antennes d'écoute ou de communication. Une caméra video montée sur une plateforme stabilisée était parfois utilisée. Le visionnage du film obtenu permettait de resituer les différentes photos prises pendant le vol, ainsi que le positionnement des antennes observées. Un vol typique durait environ 100 minutes à une altitude moyenne de 100 mètres et à une vitesse de 110 km/h. Lorsque des objectifs à photographier l'exigeaient, l'hélicoptère montait jusque 200 à 300 mètres d'altitude et volait à vitesse réduite. Néanmoins, le schéma de vol n'était pas figé et certaines mesures pouvaient exiger de monter jusqu'à 1600 mètres. Les informations recueillies par les agents allemands étaient bien entendu partagées avec les services de renseignement soviétiques, c'est-à-dire le KGB (2). Les Mi-8 faisaient parfois l'objet d'une escorte en bonne et due forme par certains appareils alliés basés à Tempelhof (Bell UH-1H et peut-être Pilatus UV-20A - Berlin Avn. Det.) ou à Gatow (Gazelle AH.1 - 7 Flight AAC, DHC Chipmunk T.10 - RAF Gatow Station Flight). Nous ignorons si des Alouette III, des Cessna L-19E (DETALAT) ou les MH 1521M Broussard puis le DHC-6 Twin Otter (Armée de l'air) du contingent français stationné à Tegel connurent de telles rencontres. Jeux d'espions
Les consoles des opérateurs est-allemands à bord d'un Mi-8 du 239.OGVP lors d'une mission "RELAIS" le long des frontières de
Berlin-Ouest. © V.Liebscher. La Zone de Contrôle de Berlin se présentait sous la forme d'un espace aérien ayant un diamètre de 64 km et une hauteur de 3000 mètres, dont le centre se trouvait à Kleistpark au nord de Tempelhof, dans l'ancien bâtiment des Autorités de Contrôle Alliées. Comme précisé plus haut, la BCZ était connectée aux trois corridors aériens de Berlin-Ouest. Les appareils soviétiques de même que ceux des LSK/LV pouvaient bien entendu traverser librement ces corridors. Les avions des trois puissances occupantes occidentales quant à eux, avaient le droit de libre cirulation dans les couloirs - sous réserve d'un dépôt de plan de vol - et à l'intérieur de la BCZ elle-même. Le vol des hélicoptères était cependant limité au survol de Berlin-Ouest intra muros, l'accès aux couloirs n'étant pas autorisé. La BCZ - qui couvrait Berlin-Est et ses abords dont les bases aériennes d'Oranienburg et de Werneuchen en limite de zone - de même que les couloirs aériens, foisonnaient de garnisons soviétiques et est-allemandes. Chose extraordinaire, les appareils alliés de Berlin avec des agents, officiers ou sous-officiers, des Missions Militaires de Liaison près du Haut Commandement Soviétique en Allemagne à leur bord, pouvaient ainsi survoler ces objectifs et les photographier. Ils faisaient parfois l'objet d'intimidations comme le tir de fusées éclairantes quand ils n'étaient pas "taquinés" par des appareils soviétiques. De plus, les couloirs aériens de Berlin étaient fréquentés par de discrets appareils de reconnaissance électronique et photographique alliés. Avant la chute du mur, les Français utilisaient des Nord N2501 Gabriel (remplacés par deux C160 Gabriel en 1989) de l'EE.54 basé à Metz; outre des missions le long de la frontière interallemande et près de la frontière tchécoslovaque, ces derniers effectuaient des vols à l'intérieur des couloirs en faisant escale à Berlin-Tegel avant de repartir en sens inverse par un autre couloir que celui emprunté à l'aller. Parfois, ils repartaient par le couloir nord pour des missions de renseignement au large de la Mer Baltique jusqu'aux abords de la Pologne avant de rentrer à Tegel, puis Metz. Au cours de ces missions dites "Baltiques", les Gabriel faisaient parfois l'objet d'interceptions par des chasseurs soviétiques ou suédois. Les américains utilisaient quant à eux des C-130E spécialement équipés (indicatifs Ask et Herky) du 7405.OS de Rhein-Main. Outre le survol des corridors de Berlin, ils étaient les seuls à oser explorer avec de telles machines la BCZ elle-même, allant jusqu'à survoler l'aérodrome civil international de Berlin-Schönefeld à 750 mètres d'altitude. Ces machines avaient de plus la priorité sur le trafic civil occidental. Les Britanniques, quant à eux, exécutaient des missions de reconnaissance photo à l'intérieur des couloirs et de la BCZ avec de vénérables Percival Pembrokes. La donne a changé après la chute du mur et la réunification allemande. Si les Missions militaires de liaison alliées ont cessé leurs activités, d'autres services ont continué à surveiller et à rechercher des renseignements sur la nouvelle armée russe. Les règles de circulation aérienne au-dessus de feue la RDA pour les aviations alliées locales furent également revues. Ainsi, la zone accessible fut élargie aux contours de la BCZ et aux bords extérieurs des corridors A et C en englobant tout le territoire situé entre les deux, et le vol des hélicoptères fut dès lors autorisé dans toute la zone. Mais en pratique, ces limites officielles furent allègrement bafouées par les aviations alliées qui commirent de nombreuses "erreurs de navigation" ! Pourtant, les Russes ne semblent pas avoir exprimé de plaintes. Mais il est vrai que les dés étaient jetés. C'est comme cela que les nouvelles limites véritables furent fixées par le rayon d'action des machines, sachant que ces dernières ne pouvaient pas se poser sur les anciennes bases est-allemandes pour se ravitailler.
> Une analyse de la photo ci-contre à droite peut être consultée ici
- L'essentiel des informations sur les missions ELINT des Mi-8 proviennent du livre de Volker Liebscher "RELAIS".
Voir > Multimedia. notes
Un Su-7 au-dessus de Berlin-Ouest le 7 avril 1965. © Flight.
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