Sous le parachute, un filet réflecteur et un corps métallique offraient une signature radar équivalente à celle d'un bombardier moyen, permettant ainsi le tir de missiles à guidage radar.
Un MiG-21 pouvait "voir" l'objectif depuis une distance de 20 km et tirer un missile R-3S à 5 ou 8 km. Plutôt résistante, la cible M6 était capable,
dans le meilleur des cas, d'encaisser jusqu’à deux missiles.
Un autre type de cible fit les beaux jours des ufologues de tout poil le 24 août 1990, lorsque plusieurs points lumineux apparemment stationnaires furent observés
et filmés par de nombreuses personnes dans la région de Greifswald. D'aucuns virent même une boule lumineuse se rapprocher de la formation principale, pour disparaître une fois
arrivée à sa hauteur. En fait, un missile fonçant sur une cible et dont le moteur s'arrêta faute de combustible peu de temps avant d'atteindre son objectif apparemment sans exploser !
Si les crédules veulent continuer de croire à un phénomène inexpliquable, c'est le général Tarasenko lui-même qui, quelques années plus
tard lors d'une interview donnée à une chaîne de télévision allemande, a confirmé l'utilisation de cibles cette nuit-là au-dessus de la Mer Baltique
(ces dernières et le tir du missile peuvent être visionnés ici : téléchargement 1
- téléchargement 2). Les recoupements des observations (voir lien 3)
indiquent que la zone d'apparition des pseudos OVNI correspondait au bord de l'extrémité sud du polygone de tir air-air - occupé ce jour-là par l'aviation
tchécoslovaque (qui eut ainsi l'honneur d'effectuer ce qui fut sans doute la toute dernière session de tirs sur ce polygone).
Toutefois, l'observation attentive des videos tournées à cette époque semble démontrer que ce ne sont pas des cibles à
proprement parler qui ont été utilisées, mais des bombes éclairantes (SAB, Svetyachtchaya Aviatsionnaya Bomba - bombe d'aviation éclairante)
conçues pour éclairer le sol lors de bombardements nocturnes. Il aurait pu s'agir de modèles SAB-100MN/MP (ces derniers utilisaient la même enveloppe externe que la cible M6),
SAB-250-200, SAB-250T ou encore SAB-500-350.
The unexplainable explained! The seven torches of a SAB flare bomb on August 24, 1990 over of the air-to-air firing range of the 16.VA.
Mais pourquoi les Tchécoslovaques ont-ils utilisé ces bombes - à priori plus faciles à "abattre" par des missiles IR car constituant plusieurs sources de chaleur -
plutôt que des cibles dédiées ? En fait, l'usage de bombes éclairantes SAB-100 et SAB-250 comme cibles semblait être une pratique répandue également mise en application
au sein des escadrons de remorquage de cibles basés à Damgarten. (1).
Une autre cible en usage était le projectile inerte R-3P (Prakticheskaya), dérivé du missile Vympel K-13 (AA-2 "Atoll"). Les avions porteurs emmenaient
généralement des missiles bons de guerre en plus des R-3P. Le leader tirait d'abord un R-3P, tandis que son ailier l'abattait.
Ensuite, le processus était inversé, l'ailier tirant à son tour un R-3P et le leader un missile actif. Il était possible de lancer un missile jusqu'à 25 secondes après le départ d'un R-3P.
En prélude au retrait annoncé des Il-28, un exemplaire du 65.OBAE fut convoyé par le pilote de Première classe Oleg Kozlov à Altes Lager
durant l'été 1986, pour y servir de cellule d'instruction technique (2).
Les appareils de cet escadron étaient retirés du service au mois de novembre suivant pour être remplacés par douze MiG-23M et UB -
le choix du MiG-23M était sans doute une mesure intérimaire en attendant l'entrée en service d'une machine plus adaptée. L'origine de
ces appareils reste sujet à caution. Tout au plus, pouvons nous constater qu'une carcasse de MiG-23M originaire du 35.APIB de Zerbst était
présente dans le dépotoir de Damgarten en 1992. Le 74.OBAE fut quant à lui dissous également en novembre 1986. La composition du 65.OBAE
changea avec l'arrivée des "Flogger". Elle était constituée de deux sections (Aviazveno) plus une troisième section indépendante
(le 125.OBAZ) composée d'éléments de feu le 74.OBAE.
Les MiG-23M utilisaient des cibles M6 (tel était le cas pour entraîner les marins à Swinoujscie), des cibles planantes (sans doute des PM-6),
ainsi que des roquettes lance-paillettes de type S-5P - elles produisaient une signature radar faisant office de cible - qui étaient emportées par de classiques conteneurs UB-32.
Enfin, à Wustrow, les MiG-23 servaient uniquement de cibles miroir (3).
Les "Flogger" du 65.OBAE ne pratiquaient pas le remorquage de cibles. Ces appareils ne sont pas restés en service très longtemps, car leur
retrait intervenait déjà en novembre 1989 lorsque les avions furent convoyés et stockés sur l'aérodrome de Step (Olovyannaya) en Sibérie.
Le 25 novembre, deux Su-25 du 357.OChAP de Brandis rejoignirent le 65.OBAE pour que les pilotes puissent s'entraîner sur cette nouvelle monture.
De plus, un biplace neuf Su-25UB (n°50) fut convoyé d'Oulan-Oudé à Damgarten au mois d'avril suivant. C'est au début du mois de mai 1990 que le
65.OBAE réceptionna dix nouveaux Su-25BM tracteurs de cibles porteurs de codes jaunes en provenance de Tbilissi en Géorgie (n°01-06 / 08-11)
(voir > L'aviation d'Assaut, part 9). Le Su-25UB resta en ligne avec
l'unité, tandis que les deux Su-25 provenant de Brandis furent envoyés à Ovroutch en Ukraine pour y être stockés.
Le remorquage de cibles aurait dû reprendre avec ces nouveaux appareils,
mais le nouveau système de remorquage Kometa était encore en phase de test pour n'aboutir qu'en octorbre 1991.
Cependant, les Su-25BM étaient aptes à l'emport de cibles M6 et PM-6. On notera que des L-39C ont également été observés à Damgarten
aux côtés des Su-25BM. Nous ignorons cependant si ces avions étaient attachés au 65.OBAE ou détachés du 368.OChAP de Demmin. Aussi, au plus tard fin juillet 1990,
deux nouveaux Su-25BM rejoignirent quant à eux directement le 368.OChAP. Contrairement aux pratiques réglementaires habituelles, ces derniers furent livrés
dépourvus de codes et ils reçurent par après les n°16 et 17.
En octobre 1990, les avions du 65.OBAE étaient redéployés à Demmin et le personnel de l'escadron réparti entre le 357.OChAP et le quatrième escadron du 368.OChAP
(4).
Le 65.OBAE était en effet dissous dans la foulée le premier novembre 1990. Les codes jaunes des avions seront repeints (et parfois changés) en rouge afin de les mettre en
conformité avec ceux du 368.OChAP. Les 12 Su-25BM furent tous affectés au premier escadron, tandis que 16 Su-25 étaient transférés au 357.OChAP à Brandis où
ils remplacèrent vraisemblablement les machines ayant le moins de potentiel restant.
With special thanks to Oleg Kozlov for his unstinting help
(1)
En avril 2012, des bombes éclairantes SAB-250T et SAB-250-200 emportées par des Su-27 ont été utilisées comme cibles lors de l'exercice "Ladoga-2012".
Ces bombes ont d'ailleurs causé un émoi similaire à celui de l'affaire de Greifswald (notamment dans les forums dédiés aux OVNIs où la plupart des intervenants
s'obstinnent au-delà de toute raison à croire en leurs chimères) car certaines furent observées et filmées de nuit par des habitants de Saint-Pétersbourg, alors qu'elles
descendaient très loin au-dessus du lac Ladoga !
Il est donc clair que l'usage de bombes éclairantes dans le cadre d'exercices d'entraînement au tir de missiles air-air n'avait rien d'exceptionnel. (2)
Différents Il-28 solitaires ont été observés sur plusieurs bases au cours du temps. Certains étaient utilisés pour l'entraînement à la réparation des dégâts reçus au combat. (3)
L'avion faisant office de cible était accroché par un radar de l'unité de tir. Un second radar répétait l'echo de cet avion
mais avec des coordonnées différentes. C'est vers ce second écho fictif ou miroir, que les obus ou les missiles étaient tirés. Un dispositif
spécial permettait d'évaluer si l'objectif avait été atteint. Schéma de principe >
ICI. (4)
Andrey Kojemyakine, spécialiste des Su-25 et auteur de l'ouvrage en deux volumes intitulé "Chtourmovik Su-25, En action depuis 30 ans"
(Chtourmovik Su-25, Tridtsat' Let v Stroyou) nous précise qu'en 1989, de nombreuses unités furent dissoutes et par conséquent, beaucoup de
pilotes se retrouvèrent sans avions. C'est ainsi que fut prise la décision de créer un quatrième escadron au sein de plusieurs régiments, tandis que le nombre
d'appareils en service avec ces mêmes unités restait identique. Les pilotes en surplus des 4è escadrons volaient donc sur les avions des trois escadrons
constitutifs d'un régiment traditionnel. Il n'est pas certain que le 357.OChAP de Brandis se vit attribuer un escadron supplémentaire. Ce fut par contre le
cas à Demmin, dont le 4è escadron fut formé en novembre 1989 selon les directives officielles.