THIS PAGE IN ENGLISH HERE

Su-25BM Brandis Comme nous l'avons vu dans la première partie de ce chapitre, l'aviation d'assaut a été purement et simplement supprimée en 1956, la directive n°30660 du Ministère de la Défense officiant le démantèlement des unités de Chtourmoviks le 29 avril. Les régiments de chasse-bombardement virent le jour quant à eux l'année suivante. Il faudra attendre le milieu des années soixante-dix pour que le concept d'avion d'assaut revienne au goût du jour de manière concrète avec le Soukhoï Su-25 et qu'avec lui renaissent les unités de Chtourmoviks. A l'époque, la chasse-bombardement reposait essentiellement sur les Su-7B et les MiG-21. Mais ces appareils étaient moins efficaces que les vieux MiG-17 plus manoeuvrants à vitesse inférieure comme cela fut démontré lors d'exercices ou lors des confrontations au Moyen-Orient. L'initiative de Soukhoï visant à développer un nouvel appareil d'assaut débuta en mars 1968. Désigné T8 en interne, le projet était initialement moins ambitieux que le futur Su-25 car, plus petit, il était également moins blindé et n'aurait pas pu emporter autant d'armement. Cependant, l'heure n'avait pas encore sonné et le programme fut rejeté au mois d'août par les VVS. Néanmoins, le développement continua en privé chez Soukhoï et déjà l'année suivante, le T8 entrait finalement officiellement en compétition pour la fabrication d'un nouvel appareil d'appui rapproché avec les projets d'Iliouchine (Il-42 plus tard redésigné Il-102 > Lien), MiG (MiG-21LCh > Lien) qui finit par jeter le gant et Yakovlev (Yak-25LCh rejeté d'emblée > Lien). Un autre produit Soukhoï, l'improbable Su-15Ch fut également considéré car certains militaires auraient préféré un appareil supersonique.

Su-25 Su-25L'Il-42, plus gros, était moins maniable. Bien que non retenu, son développement fut poursuivi de manière privée ultérieurement et il effectua son premier vol en 1982 en tant qu'Il-102 - le conflit afghan y était assurément pour quelque chose - cependant, le Su-25 y avait déjà fait ses preuves. Le premier prototype du futur Su-25 appelé T8-1 aurait dû être motorisé par des réacteurs Ivtchenko AI-25T, mais c'est le moteur Toumanskiy RD-9B démuni de sa PC fournissant ainsi 2500 kgp à sec, qui lui fut préféré et qui pris ainsi la désignation R9-300. L'appareil était muni du système d'armes du Su-17M2, soit principalement un collimateur ASP-17, un boîtier PBK-3-17S, un télémètre laser Fon-1400 et un complexe de navigation KN-23. Il était armé d'un ensemble VPU-22 monté en gondole sous le nez, décalé à droite. Dérivé du conteneur SPPU-22-01, le VPU-22 consistait en un canon bitube GCh-2-23 pouvant pivoter vers le bas juqu'à un angle de 23°. Fortement blindé, cet avion se devait également de pouvoir être déployé sur des terrains de campagne. Au cours de son développement, la masse et la taille du Su-25 - tel que désigné en septembre 1972 - augmentèrent, la charge emportée passant à quatre tonnes sous dix pylônes alaires dont deux (quatre ultérieurement) permettant de transporter des réservoirs supplémentaires. Assemblé à Moscou en octobre 1974 par le bureau de conception expérimentale Koulon - tel qu'était appelé l'OKB de Soukhoï avant 1977 - le T8-1 fut aussitôt suivi par une cellule d'essais statiques appelée T8-0. Le T8-1 décolla pour la première fois le 22 janvier 1975 depuis l'aérodrome de Joukovskiy avec à ses commandes le chef pilote d'essais de Soukhoï, Vladimir Iliouchine. C'était avec un mois de retard sur la date prévue suite à la défaillance de l'un de ses deux réacteurs. L'appareil rejoignit ensuite le centre d'essais en vol des VVS à Akhtoubinsk en juin où il fut estimé que de jeunes pilotes pouvaient le maîtriser.

Su-2BM Su-25 Le second prototype T8-2 dont le premier vol eut lieu le 26 décembre 1975, introduisait différentes modifications telles que l'ajout d'aérofreins sur les nacelles des réacteurs - déplacés à l'extrémité de carénages en bouts d'ailes sur les modèles de série - une dérive plus grande ou encore un siège éjectable K-36L. Les conditions de mise en production appelaient au montage de réacteurs plus puissants. Comme il n'y avait pas de nouveau moteur disponible rapidement, le choix s'est finalement porté sur une version sans PC du réacteur Toumanskiy R13-300 qui motorisait les MiG-21. Le R-95Ch comme il fut désigné avait une poussée de 4100 kg et la particularité intéressante de pouvoir fonctionner avec différents types de kérosène et même du diesel, mais pendant une durée limitée à quatre heures. Les deux prototypes furent remotorisés, tandis que leurs standards se rapprochaient de ceux des futurs appareils de production. Le T8-2 décolla pour un nouveau premier vol sous la désignation T8-D2 le 7 décembre 1976. Les empennages avaient désormais du dièdre positif et les réacteurs étaient désaxés vers l'extérieur, mais aussi vers le bas afin d'améliorer leur alimentation en air lors des vols avec un angle d'attaque important. Afin de diminuer les efforts sur le manche jugés excessifs, des servo-compensateurs mécaniques inspirés de ceux du Cessna A-37B (un exemplaire sud-vietnamien livré en 1976) furent installés. En mai 1977, le T8 était devenu représentatif d'un avion de série. L'envergure et la longueur du fuselage avaient augmenté, les moteurs étaient installés dans de nouvelles nacelles et le pilote était protégé par une sorte de baignoire blindée en titane dont l'épaisseur variait de 10 à 24 mm. Le pod canon VPU-22 avait cédé la place à un pack VPU-17A - cette fois monté à gauche du nez - comprenant un canon intégré bitube GCh-30 alimenté à raison de 250 obus pour une cadence de tir de 3.000 coups/minute, tandis que le système d'armes du Su-17M2 avait cédé la place à celui du Su-17M3 avec son désignateur laser Klen-PS. Le T8-1 modifié pour être proche des appareils de série revola en tant que T8-1D le 21 juin 1978. C'est à l'usine n°31 de Tbilissi en RSS de Géorgie qu'incomba la fabrication du Su-25 (582 machines produites) où il remplaça le MiG-21UM sur les chaînes de production. Quatre appareils (T8-3 à -6) de pré-production furent manufacturés entre l'été 1978 et 1980. Entre-temps, l'URSS était intervenue en Afghanistan en décembre 1979. Ce Pays était un théâtre d'opérations providentiel pour les Chtourmoviks. Aussi, décision fut prise de tester sans plus attendre le Su-25 en conditions réelles.

Su-25 Su-25 Le T8-1D et le T8-3 y effectuèrent 100 vols et 44 missions de combat en une cinquantaine de jours depuis l'aérodrome de Chindand situé à 1140m d'altitude dans le cadre de l'opération Romb entre avril et juin 1980. D'autres machines de pré-série rejoignirent les premières afin de poursuivre l'évaluation au combat du Su-25, un total de 186 sorties ayant été réalisé en décembre 1980. Le 23 juin 1980, le T8-5 destiné à étudier le comportement en vrille fut perdu avec son pilote après rupture d'une aile à 7.5G alors que l'avion était à ce moment limité à 5G (6.5G en 1984). La qualité de fabrication des appareils à Tbilissi laissait alors à désirer. Le déploiement en Afghanistan étant considéré comme concluant, la première unité de Su-25, le 200.OChAE, fut mise sur pied le 4 février 1981. L'escadron autonome rejoignit Chindand les 18 et 19 avril suivants. Sur le territoire national, c'est le 80.OChAP à Sitalchay (Sital-Tchaï) en RSS d'Azerbaïdjan qui fut créé, tandis que des essais se poursuivaient avec les prototypes. Ainsi, fut par exemple testé avec le T8-10, la possibilité de tirer des roquettes S-8 vers l'arrière pour neutraliser les défenses après une passe de tir. Les avions des premières séries disposaient de quatre lance-leurres ASO-2V pouvant tirer chacun 32 cartouches IR PPI-26, montés dans le carénage caudal du parachute derrière le gouvernail de direction. Quatre autres modules ASO-2VM furent ensuite ajoutés sur la partie arrière des nacelles de réacteur, ce qui permettait d'augmenter le nombre de passes de tir. Dès le départ, des mesures spéciales avaient été prises afin d'assurer la survivabilité du Su-25. Outre les blindages protégeant le pilote et les moteurs, les réservoirs auto-obturants étaient remplis à 70% de polyurethane afin de les prémunir contre une explosion. L'ensemble des diverses mesures de protection, extincteurs non compris, représentait un poids de 755kg. La menace des missiles sol-air Stinger s'intensifiant, le montage d'un brouilleur IR SOEP-V1A Lipa comme sur les Mi-24 fut envisagé, mais ce n'était pas possible rapidement. Aussi, la résilience de la cellule fut encore accrue par diverses mesures visant à protéger ou endurcir les zones des moteurs et des commandes de vol (1). Si le nouvel appareil fut repéré par les occidentaux dès 1977 quand un satellite US le photographia à Ramenskoye (tel que Joukovskiy était connu à l'ouest; il reçut alors la désignation provisoire de "Ram-J" - soit le 10è (J) appareil indentifié à Ramenskoye) ce n'est qu'en 1982, dans le cadre de ses opération en Afghanistan, que le Su-25 a finalement été baptisé "Frogfoot" par l'OTAN.

Su-25UB Su-25UB Destiné au support direct des troupes, le Su-25 ne devait guère s'aventurer au-delà de 50km de la ligne de front. Les Su-17 assuraient les frappes au-delà jusqu'à 150km, tandis que les bombardiers Su-24 devaient s'enfoncer davantage en territoire ennemi à 300km. Les équipements principaux du système d'armes comprenaient un collimateur ASP-17BTs-8, le télémètre laser Klen-PS associé à un système de contrôle et de correction des signaux désigné Metka et un complexe de navigation KN-23-1. Outre les lance-leurres déjà évoqués plus haut, l'avion disposait d'un détecteur d'alerte radar SPO-15 et il était susceptible d'emporter un conteneur ECM SPS-141MVG Gvozdika. Disposant de dix points d'emport répartis sous les ailes, le Su-25 pouvait emporter, outre des bombes de 100 à 500kg (quatre tonnes de bombes pour une capacité d'emport totale de 4400kg), les classiques conteneurs lance-roquettes B-8M1 et UB-32M au nombre de huit, ou encore une quantité similaire de roquettes S-13, S-24 ou S-25. Les armes à guidage laser utilisées étaient des missiles du type Kh-25ML (à raison de 4) et Kh-29L (2), ainsi que des roquettes S-25L (4). Les missiles Kh-25MTP à guidage IR faisaient également partie de l'arsenal du Su-25. Quatre pods canon SPPU-22-1 (GCh-23) ou SPPU-687 (GCh-301) ou huit conteneurs à sous-munition KMGU-2 s'ajoutaient à la panoplie du Su-25. Enfin, deux missiles R-3S ou R-60/M devaient occuper les points d'emport externes. Il était bien entendu possible de transporter des réservoirs supplémentaires, soit quatre PTB-800 ou PTB-1150. Le missile antiradar Kh-58U était également susceptible d'être utilisés par le Su-25. Lors du conflit afghan, le tir d'armes à guidage laser a parfois été facilité grâce à l'usage de véhicules BTR-80 équipés d'un télémètre/désignateur de cible laser Klen-PS monté en tourelle rétractable désignant les cibles aux Su-25 (> Lien). L'utilisation d'un tel système augmentait davantage la précision des tirs, permettant de cibler par exemple l'entrée d'une grotte. Sans doute de tels complexes désignés BOMAN (véhicule de combat pour le guidage des avions) étaient-ils également déployés en RDA ? Mais rien ne le prouve dans l'état actuel de nos connaissances.

L-39C Su-25 L'entraînement des pilotes de Su-25 se faisait initialement sur Su-17UM3 en raison de la similitude des systèmes d'armes. Cependant, les caractéristiques de vol étant pour le moins différentes, c'est l'Aero L-39C Albatros qui lui fut préféré par la suite. En 1985, une version biplace du Su-25 fut rapidement créée par l'adjonction d'un second cockpit et l'augmentation de la surface caudale. Le premier appareil de pré-production désigné T8UB-1 décollait d'Oulan-Oude en Bouriatie le 6 août 1985 suivi plus tard du T8UB-2. La production en série du Su-25UB démarra à l'usine n°99 d'Oulan-Oude en 1987. Les biplaces étaient parfois ornés de l'emblème de la ville, constitué d'un écu avec un ours. Si 200 Su-25UB furent produits entre 1986 et 1992, les unités alignaient toujours à leurs côtés des L-39C lors du départ d'Allemagne, à raison d'un total de huit appareils dans les deux régiments de la 16.VA. Dépourvus de canon interne, ces avions avaient néanmoins deux pylônes alaires destinés à l'emport de bombes d'entraînement P-50 ou de pods lance-roquettes UB-16-57. Faisant suite à la dissolution du pacte de Varsovie survenue le 1er juillet 1991, l'approvisionnement en pièces détachées provenant de Tchécoslovaquie fut perturbé. Il existait par ailleurs un simulateur de vol dédié au Su-25 désigné KTS-18.
En septembre 1985, le 357ème Régiment autonome d'aviation d'assaut (Otdelniy Chtourmovoï Aviatsionniy Polk - OChAP), activé le premier février à Proujany en Biélorussie, prenait progressivement ses quartiers à Brandis près de Leipzig . Le 225è Régiment autonome d'hélicoptères de combat (OBVP) stationné auparavant sur cette même base avait de son côté fait mouvement à Allstedt afin de laisser la place aux nouveaux Su-25. Ce jeu de chaises musicales s'était poursuivi par la mutation du 292è Escadron autonome d'hélicoptères de guerre éléctronique (OVE REB) de Allstedt à Cochstedt (> Lien), tandis que le 327è Escadron autonome d'hélicoptères d'appui feu (OVE OP) quittait lui aussi Allstedt, mais pour Schlotheim. Le 357.OChAP comptait dans ses rangs 14 Su-25 des premières séries de production, 15 de la 10è série, 2 Su-25UB et 4 L-39C. Peu documenté, voire sujet à caution, certains écrits d'origine russe mentionnent l'existence d'une capacité nucléaire pour le Su-25. Ainsi, selon A. Kojemyakine et A. Korotkov, spécialistes du Su-25, le premier escadron du 357.OChAP avait une mission d'attaque nucléaire. L'entraînement au chargement d'une arme nucléaire avait lieu une à deux fois par mois. Les "sourds-muets" (le personnel responsable des armes nucléaires) procédaient à l'accrochage de l'arme spéciale soit à l'intérieur d'un hangar de maintenance fermé en été, soit à l'extérieur dans une alvéole en hiver lorsqu'il faisait noir. Une fois que le personnel au sol avait terminé son travail et entré les codes, c'était au tour du pilote d'entrer les siens. Ensuite, l'arme était retirée et à nouveau stockée. Cet escadron volait essentiellement de nuit. Le second escadron pouvait effectuer des missions autres que l'attaque au sol, comme la reconnaissance, tandis que le troisième escadron entraînait les jeunes pilotes. Le champ de tir attitré du 357.OChAP était celui de Belgern. Si le tir canon et lance-roquettes était monnaie courante, de même que le largage de bombes légères ou de bombes freinées OFAB-250ChN, le tir de missiles air-sol était rare, de même que l'emploi de conteneurs canon SPPU-22.

ORBAT 1976 - 1994

Su-25 Su-25 En 1988, la présence soviétique en Afghanistan touchant lentement à sa fin, le 357.OChAP, jusqu'alors seul du genre en RDA, était rejoint par un régiment de vétérans : le 368.OChAP. Ce dernier avait été mis sur pied à Jiovtnevoye près de Lvov le 12 juillet 1984, dans le District militaire des Carpates. Les opérations aériennes commencèrent en septembre 1984 depuis l'aérodrome de Kalinov avec des Su-25 des seconde et quatrième séries provenant du 760.IIAP du 4.TsBP i PLS de Lipetsk. Pilotes et membres du personnel au sol du régiment furent envoyés en Afghanistan à partir d'octobre 1986, où ils furent affectés au 378.OChAP qui brassait du personnel issu des différentes unités de Chtourmoviks. Les premier et second escadrons du 378.OChAP étaient stationnés à Bagram, tandis que le troisième se trouvait à Kandahar. En octobre 1988, 62 pilotes et techniciens du 368.OChAP rejoignirent le troisième escadron du 378.OChAP qui avait été relocalisé à Chindand. Entretemps, les 1.AE et 2.AE du 368.OChAP en partie rééquipés d'appareils de la 10è série, avaient déménagé en mai pour Tchortkov en Ukraine. Quant aux avions des premières séries du 3è escadron, ils furent transférés vers d'autres unités. C'est finalement le 18 décembre 1988 que le régiment posait ses pénates en RDA à Demmin-Tutow. A cette occasion, des pilotes du 357.OChAP aidèrent leurs collègues du 368.OChAP au transfert des avions vers Demmin.
La situation de leurs deux bases plaçait les 357. et 368.OChAP directement face à leurs zones de combat potentielles, soit la brèche de Fulda (un effondrement géologique dans le massif de Thuringe) et la grande plaine du nord de l'Allemagne. Comme c'était le cas pour les bases d'hélicoptères, ni la base de Brandis, ni celle de Tutow ne possédaient d'abris blindés pour avions. Ce détail, insignifiant en apparence, indique qu'en cas de conflit les versatiles Su-25 auraient été dispersés par section (Aviatsionniy Zveno - AZ), sur des terrains d'aéro-clubs où sur des pistes de fortune, à proximité immédiate des zones d'affrontement. La capacité à opérer en dehors des infrastructures d'une base aérienne classique avait d'ailleurs été poussée très loin avec le Su-25. Le complexe AMK-8 était conçu afin de permettre à une section de quatre "Frogfoot" d'opérer en toute autonomie pour une période de cinq jours depuis un terrain avancé, pourvu que carburant et munitions soient disponibles sur place.

Su-25 Su-25 L'ensemble AMK-8 était composé de quatre conteneurs particuliers (> Lien). Le premier (K1-E) emportait une unité de démarrage (APU) afin de pouvoir mettre en route les moteurs, activer les treuils pour soulever l'armement et procéder aux tests des divers équipements de l'avion avant le vol (Su-25K tchadien avec conteneur K1-E ouvert > Lien ); le second (K2-D) contenait un système de ravitaillement en carburant, huile, liquide hydraulique et oxygène (> Lien); le troisième (K3-SNO) abritait les bâches de protection, les caches d'entrées d'air, les cales, les outils, une échelle pliante, des pièces de rechange ou encore un treuil électrique pour les munitions; quant au quatrième (K4-KPA) il transportait les équipements de test. L'addition d'un cinquième container destiné au transport d'un mécano fut considérée par certains clients, mais non retenue !
Les deux régiments d'assaut de RDA, contrairement à leurs collègues sur MiG-27 "Flogger" et Su-17 "Fitter", n'étaient pas groupés au sein d'une division mais dépendaient directement de l'Etat-major de la 16.VA. A mission particulière, contrôle particulier. Familièrement appelés Gratch (Corbeaux freux), la plupart des Su-25 "Frogfoot-A" de la 16.VA arboraient sur leur entrée d'air gauche une représentation humoristique de l'oiseau noir de nos campagnes. Cet emblème était un héritage de la campagne d'Afghanistan, lorsqu'il fut appliqué pour la première fois sur un avion fin 1984. Il ne signifiait toutefois pas que les avions qui en étaient ornés avaient effectivement combattu sur ce théâtre d'opérations. Ainsi, les appareils de Demmin dont aucun ne prit part au conflit, reçut ces emblèmes peu avant le départ pour la RDA. Citons pour l'anecdote l'architecture de type "orientale" du bâtiment SLB35 (> Lien) abritant la balise d'approche et son personnel d'entretien qui était situé au bout de l'extrémité est de la piste de Demmin, issu probablement de l'expérience afghane ! En 1990, une attention particulière fut portée à la formation de pilotes opérationnels prêts au combat au sein du 368.OChAP. Douze pilotes furent qualifiés au tir de missiles air-sol. Le régiment fut évalué positivement lors d'une période de déploiement à Louninets entre le 1er et le 8 juin. Toujours en 1990, une importante rotation de personnel eut lieu, lorsque pratiquement l'équivalent d'un escadron en provenance de Sitalchay rejoignit Demmin. Cette même année, le régiment alignait une trentaine de Su-25 dont 12 Su-25BM et trois Su-25UB. Dix Su-25BM ainsi qu'un Su-25UB provenaient du 65.OBAE (voir plus bas). Le régiment avait en outre une dotation de quatre L-39C.

Su-25BM Su-25BM En novembre 1989, les MiG-23M du 65è Escadron autonome d'aviation de remorquage (de cibles) (OBAE) de Damgarten furent retirés du service au profit d'une dizaine de Su-25BM - BM pour Bouksirovchtchik Micheney - remorqueur de cible (voir > Les remorqueurs de cibles, partie 2). Il s'agissait d'une nouvelle version polyvalente d'assaut et de remorquage de cible possédant outre toutes les capacités d'avion d'assaut du modèle standard, de nouveaux réacteurs R195 plus puissants (4.300 kgp contre 4.100 kgp pour les R95Ch d'origine) à émissions thermiques réduites, un ensemble de radio navigation à longue distance RSDB-10 et les systèmes internes requis pour permettre le remorquage de cibles aériennes au profit de la D.C.A. ou de la chasse. Ainsi, les Su-25BM étaient censés emmener sous l'aile gauche le conteneur du complexe Kometa long de 2M13 et pesant 46kg. Ce dernier était composé du treuil de tractage à turbine TL-70 (> Lien) et d'une cible remorquée derrière un câble de 2300 à 3000 mètres de long permettant le tir à vue, par détection IR ou radar. Le conteneur du treuil étant monté sous l'aile gauche, un contre-poids aérodynamique ressemblant à s'y méprendre à une bombe était placé sous l'aile droite en compensation. La cible était fixée à un support déployable sous la partie arrière du conteneur du treuil. En outre, jusqu'à quatre cibles PM-6, propulsées par fusée et destinées à simuler un avion évoluant en piqué selon un angle de 30 à 70 degrés, pouvaient être accrochées sous des pylones d'emport adaptés. L'emport de deux réservoirs supplémentaires ne permettait pas d'emmener plus de deux PM-6. Les cibles de type M6 étaient également utilisées par les Su-25BM. Extérieurement, ces appareils se distinguaient des Su-25 standard par une petite prise d'air montée sous la partie postérieure des nacelles de réacteur (aux formes légèrement modifiées à l'arrière) associée à un dilueur de jet monté dans les tuyères afin de réduire la signature IR des moteurs, ainsi que par la présence d'une autre prise d'air plus grande implantée sur le dessus des nacelles. Cette dernière remplaçait la double prise d'air qui était auparavant installée à la base de la dérive et qui était destinée au refroidissement des générateurs entraînés par les réacteurs. L'association des nouveaux réacteurs à une meilleure suite de navigation faisait de cette version du "Frogfoot-A," la plus efficace de l'époque. Il avait été initialement prévu de produire un total de 170 Su-25BM et une cinquantaine d'entre eux fut effectivement livrée avant que l'usine de Tbilissi ne devienne propriété du nouvel Etat géorgien à l'issue de la désintégration de l'Union soviétique.

Su-25 Su-25 L'utilisation du système Kometa par les avions du 65.OBAE est exclue, car les tests initiaux n'aboutirent qu'en octobre 1991. De plus, les treuils TL-70 devant être également construits à Tbilissi, ces derniers ne furent pas livrés et pour couronner le tout, les cibles PM-6 devinrent elles aussi indisponibles car produites à Doubovaya en Ukraine. Ainsi, les Su-25BM n'effectuèrent pas de remorquage de cibles. Les appareils de Damgarten ont pu néanmoins exécuter leur mission en employant des cibles M6 et PM-6. Dix nouveaux Su-25BM destinés au 65.OBAE furent convoyés de Tbilissi à Damgarten au mois de mai 1990. Un Su-25UB neuf avait également été réceptionné par l'unité le mois précédent. Aussi, au plus tard fin juillet 1990, deux nouveaux Su-25BM rejoignirent quant à eux directement le 368.OChAP. En octobre 1990, les avions du 65.OBAE étaient redéployés à Demmin et le personnel de l'escadron réparti entre le 357.OChAP et le quatrième escadron du 368.OChAP (2). Le 65.OBAE était en effet dissous dans la foulée le premier novembre 1990. Les codes jaunes que les avions portaient au sein de cette escadron seront repeints (et parfois changés) en rouge afin de les mettre en conformité avec ceux du 368.OChAP. Une bonne partie des 12 Su-25BM fut affectée au 1.AE, tandis que 16 Su-25 du 368.OChAP furent transférés à Brandis où ils remplacèrent vraisemblablement les machines ayant le moins de potentiel restant. Le 357.OChAP comprenait alors le premier escadron avec 10 machines monoplaces toutes issues de Demmin et 2 Su-25 biplaces, tandis que les second et troisième escadrons mettaient chacun en oeuvre 10 appareils. Le régiment comptait également quatre Aero L-39C. C'est au printemps 1992 que sonnait le début du retrait des Su-25 de la 16.VA. Après avoir préalablement convoyé le 28 mars ses avions d'entraînement L-39C à Kobrin au Belarus et une poignée de ses Su-25 à Tutow, le 357.OChAP déménageait le 28 avril 1992 ses vingt-quatre derniers "Frogfoot" à Boutourlinovka, au sud-est de Voronej où le régiment était dissous le mois suivant. Les machines du régiment furent quant à elles ventilées au sein de plusieurs unités. Une quinzaine d'appareils quittèrent leur stockage temporaire à Boutourlinovka pour rejoindre le 18.GvChAP "Normandie-Niemen" à Galenki en Extrême-Orient. Quelques-unes peu nombreuses restèrent sur place pour intégrer le 899.OChAP (3) local. Cette unité reprenant les traditions du 15.IAP fut réactivée en 1992 tout d'abord en tant que 899.IChAP sur la base du 186è Régiment d'instruction d'aviation d'assaut (186.IChAP) stationné sur le même aérodrome. La désignation de 899.OChAP étant officialisée le premier juillet 1993. Cette formation constitua l'unique régiment de Chtourmoviks affecté à la nouvelle 16.VA de Koubinka le premier décembre 1993.

Su-25 Su-25BM Un an après le départ du 357.OChAP venait le tour des "Frogfoot" du 368.OChAP de Tutow. Le 15 juin 1993, faute de carburant disponible sur place en quantité suffisante pour permettre leur transfert direct vers la CEI, les trente-cinq Su-25 du 368.OChAP ralliaient, sous le commandement du Colonel Nikolaï Ivanovitch Tankouchine tout d'abord Gross Dölln d'où, le lendemain 16 juin, ils s'élançaient pour rejoindre par étapes Boudennovsk, un aérodrome sis au coeur du Caucase; une région qui à cette époque bruissait déjà des combats se déroulant en Abkhazie. Toujours en juin, le régiment devenait le 368.ChAP et changeait de numéro de poste de campagne à l'occasion de son rattachement à la 1.GvChAD (Chtourmovaya Aviatsionnaya Diviziya) de Krasnodar sur le Kouban, l'unité rejoignant les rangs de la 4ème Armée des VVS & PVO (autrefois 4.VA) russe de Rostov-sur-le-Don. Le 20 juillet, le 368.ChAP passait sous le commandement du Colonel Sergeï K. Borisyouk qui n'était autre que le dernier commandant du 559.APIB de Finsterwalde ! (en photo dans le 5è partie de ce chapitre). En août, des unités de soutien (communication et maintenance) furent rapatriées à Boudennovsk depuis Demmin, mais les vols ne reprirent finalement qu'en novembre. Les Su-25 d'Allemagne devaient cependant faire un retour à l'avant de l'actualité puisqu'en raison de leur profil très particulier, ils ont trouvé un emploi imprévu lors des conflits qui agitèrent à intervalle régulier les marches de l'ex-empire soviétique en Abkhazie, au Tadjikistan, ou encore entre décembre 1994 et août 1996 en Tchétchénie autoproclamée. Plus tard encore, le 368.ChAP, aux côtés des 11.ORAP, 599.BAP et 487.OVP BU (4) eux aussi jadis stationnés en RDA, pris part au conflit géorgien du moins d'août 2008 où il perdit trois Su-25 (1 pilote blessé et un tué) dont un abattu par des tirs amis. On notera par ailleurs pour la petite histoire qu'un ancien Su-25 357.OChAP a été identifié par son numéro constructeur comme ayant été livré à la force aérienne iraquienne. Nous ne nous étendrons pas sur le rôle vraisemblable de Su-25 du 368.ChAP dans la guerre russo-ukrainienne débutée en février 2022 car cela sort largement du cadre de ce site et trouver des informations fiables relève du fantasme.


 Su-25 & L-39 PHOTO PAGE 
 Su-25 ex-65.OBAE PHOTO PAGE 
 Prisonniers de "l'Armée rouge" 
notes

(1) En huit années de guerre en Afghanistan, 23 Su-25 ont été perdus lors de 60.000 sorties. 38 appareils ont été détruits toutes causes
     confondues.
(2) En 1989, de nombreuses unités furent dissoutes et par conséquent, beaucoup de pilotes se retrouvèrent sans avions. C'est ainsi que fut prise la
     décision de créer un quatrième escadron au sein de plusieurs régiments, tandis que le nombre d'appareils en service avec ces mêmes unités
     restait identique. Les pilotes en surplus des 4è escadrons volaient donc sur les avions des trois escadrons constitutifs d'un régiment traditionnel.
     Il n'est pas certain que le 357.OChAP de Brandis se vit attribuer un escadron supplémentaire. Ce fut par contre le cas à Demmin, dont le 4è
     escadron fut formé en novembre 1989 selon les directives officielles.
(3) Devenu par perpétuation des traditions du 20.GvAPIB dissous le 1er mai 1998, le 899.GvChAP !
(4) - 11.ORAP (4.A VVSiPVO), autrefois basé à Welzow et volant sur Su-24MR - équipement inchangé, stationné à Marinovka en 2008.
     - 599.BAP (4.A VVSiPVO), autrefois 559.APIB basé à Finsterwalde et volant sur MiG-27K. Equipé de Su-24M et stationné à Morozovsk en 2008.
     - 487.OVP BU (4.A VVSiPVO), autrefois basé à Werneuchen et volant sur Mi-8 et Mi-24. Equipement de base similaire, mais appareils
       modernisés (une partie des effectifs) + Mi-9. Stationné à Bouddenovsk en 2008.

previous Plan du site - Sitemap next