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USMLM USMLM Bill Burhans a servi comme officier de renseignement avec l'Equipe Air (Air Team) de la USMLM de Juillet 1971 à Juin 1975. Il est revenu en 1979 pour commander le Détachement n°16 du 7113ème Escadron d'activités spéciales (soit l'Equipe Air), partant à regret au début du printemps 1980, après un désagréable incident commandité par les Soviétiques en Décembre 1979. Il nous relate ici comment la USMLM a essayé de prendre les premières photographies des nouveaux MiG-25 le jour de leur arrivée à Werneuchen.

MiG-25RBV MiG-25RU L'une des missions de renseignement les plus frustrantes dont je me souvienne s'est déroulée à Werneuchen, un jour de novembre 1974. Nous avions reçu une information de TAREX - l'excellent système de renseignement opérationnel à Berlin depuis le début des années soixante-dix - qui précisait que la livraison de nouveaux MiG-25 FOXBAT de reconnaissance était attendue ce jour-là à Werneuchen, un aérodrome situé un peu au nord-est de Berlin. Bien que dénommé de manière anodine Target Exploitation (exploitation des objectifs), TAREX était une structure où des spécialistes du renseignement ayant accès aux informations provenant de toutes les sources les fusionnaient et en extrayaient celles les plus sensibles pour les transmettre à l'Equipe Air de la USMLM. Il était ainsi possible de cibler des objectifs précis en employant au mieux les moyens limités de l'Equipe Air. Le 931è Régiment autonome d'aviation de reconnaissance de la garde, directement subordonné au QG de la 16ème Armée aérienne, était basé à Werneuchen. Il semblait que cette unité allait recevoir un nouveau type d'appareil présentant un intérêt exceptionnel pour la communauté du renseignement américaine, un appareil qui par ailleurs n'avait jamais été observé en première ligne (Forward Area) auparavant.

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J'avais été désigné avec le Sergent-chef Konrad Spitzenberger (Spitz) pour former l'équipe d'alerte (stand-by response team) et c'est ainsi que nous furent chargés de cette mission particulière. Werneuchen était un objectif très difficile à couvrir. Tout d'abord, l'aérodrome lui-même était profondément enfoncé dans une Zone Interdite Permanente (ZIP). Selon les cartes soviétiques officielles, la ZIP comprenait tout le territoire à l'est de l'autoroute A-10 (le Berliner Ring, marqué du chiffre 10 sur la carte ci-dessus) et englobait ainsi les zones jouxtant le terrain. Ensuite, les abords de la ZIP limitaient sérieusement l'accès aux quelques points d'observation (OP) viables; ces derniers se trouvaient à la jonction de deux Autobahn, très proches de la banieue nord de Berlin-Est. Enfin, pratiquement le seul moyen d'accès vers cette zone devait se faire via le Berliner Ring, ce qui exposait notre véhicule à une détection prématurée. Et si cela ne suffisait pas, ces points d'observation étaient très loin - environ 13 kilomètres - de l'extrémité ouest de la piste de Werneuchen et nous ne pouvions donc pas espérer réaliser de très bonnes photos depuis ces endroits. Nous avons heureusement eu la chance de pouvoir prendre position dans un point d'observation préliminaire (pre-OP) sans attirer l'attention. Nous nous sommes installés en haut d'une colline, le long d'une ligne d'arbres, dans une zone relativement surélevée et à l'abri du trafic sur la route toute proche. Nous avons attendu longuement que l'activité prévue se concrétise. Le temps n'était pas fameux, le plafond assez bas et la lumière blaffarde. Nous avons attendu une éternité dans ce pre-OP, gardant les yeux et les oreilles en alerte non seulement pour détecter toute activité aérienne, mais également pour déjouer l'arrivée possible de mouchards (le personnel de surveillance de la Stasi).

MiG-25RBV MiG-25RBV Soudainement, Spitz cria qu'il voyait un avion en approche ! Comme par hasard, je n'étais pas à côté du véhicule (et donc des appareils photo), étant en train de satisfaire un besoin naturel juste à ce moment-là. Je me précipitai vers la voiture en remettant tout en place pendant que je courrais. Je réussis à attraper le boîtier équipé d'un objectif Nikon de 1000mm pour prendre quelques photographies alors que cet avion passait au-dessus de notre emplacement. Nous avions été très surpris par ce FOXBAT venant de l'ouest. N'ayant pas entendu d'essais moteur, nous ne nous attendions pas à voir d'avions de si tôt. Nous avions néanmoins obtenu quelques vues de cet appareil plutôt distant... Il était clair que la taille des images serait insuffisante pour permettre une exploitation valable. Mais nous avions au moins réalisé une chose : les premières photos de la USMLM du nouveau FOXBAT en première ligne. Spitz et moi pensions avoir vu le premier avion revenant d'un vol de reconnaissance météorologique. Les autres appareils de ce déploiement ne devaient sans doute pas tarder. Cela faisait maintenant très longtemps que nous étions en position et il n'y avait absolument personne aux alentours. Nous nous sommes regardés. Allons-y ! Nous avons bondi dans le véhicule pour rejoindre la route 158 et la ville de Blumberg. Il fallait se rapprocher du terrain. Mais bien entendu, nous serions de ce fait en pleine ZIP, opérant selon la maxime "le résultat est proportionnel au risque pris" (high risk, high gain). Cet objectif était hautement prioritaire et les conditions étant favorables, nous prenions un risque calculé. Je décidai ce jour-là de pénétrer dans la ZIP selon le raisonnement qu'il s'agissait d'un objectif vital pour lequel les hautes autorités à Washington réclamaient des résultats. Pour autant que nous pouvions nous en rendre compte (et il s'avéra que cela était juste), nous n'avions pas été repérés.

MiG-25 observés par les MML alliées entre novembre 1974 et mars 1975
16/11/743 x MiG-25RU & 1 x MiG-25RBVFoxbat-B & -CMiG-25RBV
18/11/743 x MiG-25RBVFoxbat-B
23/01/753 x MiG-25RBVFoxbat-B
08/02/755 x MiG-25RBVFoxbat-B
21/03/754 x MiG-25RBVFoxbat-B
Bort nomerMiG-25RBV14/21/25/26/27/28/29/30/31/32/35/52/68/86
Inconnu11
MiG-25RU01/02/03
D'après Bundesarchiv Koblenz B206/1019, Seite3 im Bericht 04-05-05

J'avais été promu au grade de Major et si nous avions été détenus là-bas, j'aurais certainement été déclaré persona non grata (PNG), mon laissez-passer (propousk) retiré et j'aurais été muté à un autre poste hors de la USMLM (en d'autres termes, viré !), mais ce n'était pas un facteur déterminant. Cela n'aurait pas été vraiment un point noir dans ma carrière, car beaucoup auraient considéré le fait d'être déclaré PNG comme une distinction honorifique. En revenant sur cet épisode plus de 35 années après et en étudiant ma décision, je réalise maintenant que je n'avais pas pris en considération le fait que Spitz aurait été lui aussi déclaré PNG, ce qui aurait constitué un coup dur pour l'Equipe Air. Au cours de ses cinq années de service avec la USMLM, Spitz a été promu deux fois et décoré trois fois de la médaille pour service exceptionnel (Meritorious Service Medal). Mais dans le cas de ce sous-officier à la fois intrépide et compétent dans la recherche du renseignement, ces récompenses étaient largement méritées car obtenues pour ses actions sur le terrain. Nous n'étions pas loin de l'un des ponts enjambant l'Autobahn et nous l'avons emprunté afin de passer à l'est de cette dernière, dans la ZIP en direction de l'aérodrome. Aucun d'entre nous n'avais encore jamais pénétré à l'intérieur de cette ZIP. Le terrain était peu connu, mais d'après la carte, il était certain que nous devrions manoeuvrer près du site SA-3 de Werneuchen afin de nous rapprocher de la base. Cette carte nous indiquait également que nous allions devoir traverser successivement deux passages à niveau, le premier juste à l'est de Blumberg et le second à l'est de Seefeld. Heureusement, ils étaient tous les deux non gardés et nos traversées n'attirèrent donc pas l'attention.

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Cela faisait maintenant environ dix minutes que nous avions vu le premier appareil. Nous étions sur un terrain dégagé à l'est de Seefeld, ce qui permettait une échappée sans encombre. Notre véhicule était un fidéle 4x4 Ford Bronco. Il faut souligner que ce dernier apportait un degré de sécurité supplémentaire dans le sens où il ressemblait un peu aux nouvelles Jeep soviétiques UAZ-469 dont le GSVG était en cours de rééquipement rapide. Nous nous sentions en sécurité, parqués sur une petite colline à environ deux kilomètres du site SA-3, d'où nous pouvions surveiller notre environnement. La balise d'approche externe était à 1,5 km. Nous avons continué à chercher un bon point d'observation d'où l'aérodrome serait visible tout en restant dans l'axe d'approche. Nous espérions pouvoir photographier le restant des appareils qui devaient encore arriver ce jour-là selon nos informations. Ils auraient alors survolé la balise d'approche externe à une altitude d'environ 600 mètres ou un peu moins. Nous aurions pu observer la base depuis une distance de 3 kilomètres si le temps n'avait pas subitement empiré. Le plafond est tombé et le brouillard commença à se développer dans les creux. Malheureusement, tout était calme. Nous avons encore attendu longtemps en vain, jusqu'à ce que nous décidions de jeter le gant et de quitter la zone. Nous avions eu de la chance de ne pas attirer l'attention jusque-là. Il aurait été dommage d'être capturé dans la ZIP et de risquer l'expulsion de la USMLM pour rien.

MiG-25RBV MiG-25RBV Nous sommes remontés à bord de notre fidèle Bronco, mais lorsque Spitz a tourné la clé de contact, rien ne s'est produit, pas même un clic. Les Bronco étaient les véhicules préférés pour les missions de reconnaissance et quand il était possible de choisir entre une voiture équipée d'une boîte manuelle ou automatique, Spitz choisissait toujours celle avec la boîte manuelle. Mais évidemment, nous avions une boîte automatique ce jour-là et bien que nous étions en haut d'une colline avec suffisamment d'inclinaison pour permettre un démarrage avec une boîte manuelle, il n'en était pas question avec ce véhicule. Ainsi, notre présence à l'intérieur de la ZIP devenait tout à coup moins confortable ! Après quelques vérifications sous le capot, des tests basiques et quelques recherches dans le sac à outils pour trouver un dispositif permettant de connecter les bornes du démarreur, Spitz qui était un magicien capable de réparer à peu près n'importe quoi, réussi à faire démarrer ce bon vieux moteur V-8 302 CID. Le retour vers le pont au-dessus du Berliner Ring afin de sortir de la ZIP se déroula sans encombre. Comme il s'agissait d'une mission ciblée, nous n'avions plus d'autre objectif à visiter et nous sommes rentrés immédiatement au rapport à Potsdam avant de repasser à Berlin-Ouest. Le lendemain, nous apprenions que le déploiement avait bien eu lieu. Les autres pilotes, pour qui les alentours de l'aérodrome n'étaient sans doute pas familiers, avaient reçu l'ordre d'atterrir en effectuant une approche directe par l'est avec le vent dans le dos, plutôt que d'effectuer un circuit d'approche traditionnel avec un atterrissage face au vent. Nous n'avions donc pas commis d'erreur, mais les "méchants" nous avaient joué un tour ! Peu après cet épisode, mon collège et ami Larry Patterson, avec le support de Spitz, a finalement obtenu la photographie exceptionnelle illustrée ci-dessus à gauche, de cet appareil de reconnaissance représentant un objectif hautement prioritaire en matière de renseignement.



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