Наши русскоязычные читатели могут прочитать подлинник рассказа Виктора Валвика ЗДЕСЬ Il y a longtemps que la présence à Allstedt d'un régiment d'aviation de reconnaissance pendant l'époque soviétique maintenant si éloignée n'est plus un secret. Différents services de renseignement provenant des pays situés de l'autre côté de la barricade étaient très intéressés par les activités de reconnaissance des aviateurs. L'utilisation des Missions militaires de liaison - formées selon les accords de Potsdam en 1945 (1) - était le meilleur moyen pour mener à bien ces activités de renseignement pour les pays de l'OTAN. Les autorités de la RDA n'avaient pas le droit de détenir les représentants de ces missions quelles que soient les circonstances. Les autorités de l'administration militaire du Groupe des Forces Soviétiques en Allemagne étaient les seules à pouvoir les détenir en cas de violation des règles établies pour ces missions. Ces dernières voyageaient à l'intérieur de la RDA sur des routes autorisées où même l'administration de GFSA n'avait pas le droit de les arrêter. Mais si l'une d'entre elles quittait ces routes établies (2), les militaires soviétiques pouvaient la détenir - si toutefois ils y parvenaient - et préparer une déclaration [Akt] décrivant les différentes violations (3). Cependant, si il n'était pas possible de l'attraper, alors, de fait, il n'y avait pas de violation. Les règles étaient identiques pour l'OTAN en RFA, où les Missions militaires de liaison soviétiques étaient actives [dans les anciens secteurs d'occupation américain, britannique et français]. Il faut préciser que l'usage des armes était - en principe (4) - exclus de même que la violation de l'extraterritorialité. En d'autres termes, nous ne pouvions pas pénétrer à l'intérieur du véhicule d'une mission et éjecter ses passagers. Statut diplomatique oblige ! Mais pour faire bonne mesure, une déclaration relatant les violations constatées était établie, les diplomates étaient convoqués, des protestations étaient déposées, en résumé, la tension diplomatique montait. Les Missions militaires de liaison évitaient par conséquent la capture autant que possible. Ainsi, un atavisme historique ancien et l'anachronisme de l'amitié étroite des différents pays qui composaient la coalition anti-hitlérienne ont survécu jusqu'à la fin des années quatre-vingts. J'ignore ce qu'il en était pour nos gars en RFA, mais en RDA, nos "amis" ont utilisé pleinement le potentiel des missions lors de reconnaissances sans crainte de représailles particulières (5), mais s'efforçant de ne pas être impliqués avec les services de contre-espionnage soviétiques. Il y avait, pas si loin que cela, à environ trente kilomètres d'Allstedt, une route que les missions militaires étrangères pouvaient utiliser. Les jours de vol, les "Jeeps" des missions militaires étrangères effectuaient des va-et-vient sur cette route. Il s'agissait de "Jeeps" spéciales qui ressemblaient beaucoup aux nôtres, mais qui étaient trois fois plus puissantes et qui étaient même équipées de pneus leur permettant de traverser les marais sans que vous puissiez les rattraper avec une "Volga". Et il y avait une abondance de matériel de reconnaissance à l'intérieur des "Jeeps" : appareils photo, équipement radio (6) et autres. Cependant, à trente kilomètres du circuit d'approche finale vous êtres trop loin et l'aspect des photos s'en ressent. En un mot, la qualité n'est pas là. Et si vous pouviez vous rapprocher, vous pourriez peut-être alors voir en plus l'une ou l'autre chose intéressante en prime. Néanmoins, se rapprocher était interdit et il y avait des pancartes libellées en Anglais, en Français, en Russe et en Allemand sur chaque bretelle le long de la route qui précisaient que "le passage des membres des missions militaires étrangères de liaison était interdit." Mais il ne s'agissait que de mots. Il n'y avait pas de champs de mines, ni de fils barbelés. Autrement dit, c'était interdit sans plus. Les "missionnaires" les plus audacieux bifurquaient vers Allstedt, se rapprochaient le plus possible, faisaient rapidement leur sale boulot et retournaient rapidement vers la route autorisée. Il faut dire qu'ils étaient très souvent couronnés de succès. Tandis que le camp soviétique reprenait ses esprits, il fallait trouver un groupe d'intervention, un moyen de transport pour ce groupe et du carburant pour les véhicules. En résumé, c'est l'arrière du véhicule de la mission quittant la zone interdite que nous avons vu à plusieurs reprises. Mais il était impossible avec nos moyens de transport de le rattraper. Et ainsi, un beau jour d'été, un MIRACLE s'est produit. Une chose qui ne peut se réaliser que dans les conditions du socialisme en plein développement. Alors qu'une session de vols battait son plein, une Mission militaire de liaison britannique [BRIXMIS] comprenant trois hommes changea radicalement d'itinéraire et bifurqua vers Allstedt pour entrer dans les bois près de l'axe d'approche finale à quelques trois kilomètres de la base. Insolence et impudence de premier ordre ! Chaque partie était occupée à sa tâche : nous étions impliqués dans la reconnaissance, de même que les britanniques, mais avec des objectifs opposés. Les Anglais s'étaient installés impudemment tout en tenant compte de possibles circonstances inattendues. Il avaient parqué leur "Jeep de reconnaissance" dans la direction d'un chemin de campagne au cas où un départ d'urgence serait nécessaire. Ils avaient cependant oublié un détail : un grand chêne dont le tronc faisait environ un mètre de diamètre se trouvait deux mètres derrière le véhicule. Or, ce jour-là, Sacha V., l'officier politique adjoint, circulait à bord d'un camion ZIS essayant de rejoindre l'aérodrome avec sa charge de 10 litres de carburant et de 2 tonnes de charbon. Le camion avançait péniblement malgré de nombreux dysfonctionnements. Le chauffeur qui maîtrisait le véhicule n'était pas complètement de nationalité slave. Alors qu'ils se déplaçaient le long du chemin de campagne par pure coïncidence, l'officier politique aperçu la mission près du chêne. C'est avec un peu de peur ou de surprise que Sachen'ka cria au chauffeur : "Espions !" Le chauffeur, qui connaissait ce mot - sans doute avait-il vu ce poster disant "Mort aux espions !" alors qu'il étudiait le Russe - pris l'ordre au pied de la lettre. Se penchant sur son volant, il percuta à pleine vitesse le véhicule de renseignement. Comme le ZIS avançait à peine, la collision fut modérée, ce qui sauva la vie des espions. Ce fut la dernière action du glorieux véhicule. Suite à cet "abordage", le pare choc arrière de la "super Jeep" percuta le chêne et le ZIS se retrouva empêtré dans le pare choc avant. Terminé ! Le "chaudron" était fermé; la route d'évasion était bloquée. Sachen'ka envoya aussitôt le conducteur à la garnison pour prévenir le groupe spécial d'intervention. Sachen'ka resta pour garder les missionnaires britanniques malchanceux. Les Anglais, après s'être remis de leurs émotions, informèrent Sachen'ka quant à leur statut diplomatique bien qu'étant des militaires, et qu'il n'était pas question d'entrer dans leur véhicule, considéré comme territoire britannique ! En réponse, Sachen'ka annonça que l'entrée dans le territoire du ZIS n'était pas permise. Ainsi commença une période d'attente tendue. Les Britanniques, outre le fait qu'ils se conduisaient très correctement et de manière amicale, connaissaient très bien la langue russe. Ils admirent qu'ils s'étaient fait avoir et redoutaient les réactions de leur commandement qu'ils allaient devoir affronter. L'attente interminable du groupe d'intervention et des représentants de l'administration militaire soviétique [la Komendatoura locale] continuait. Comme il n'y avait rien d'autre à faire, ils se mirent à discuter de la pluie et du beau temps, et même un peu de politique. En effet, Sachen'ka voulait leur tirer les vers du nez !
Mais pour qui se prennent-ils, ces Britanniques ? Sachen'ka détailla les évènements de Belfast en Irlande du Nord, soulignant qu'ils étaient les oppresseurs du peuple irlandais avide de
liberté et ainsi de suite. Les Britanniques n'en revenaient pas ! Ils étaient absolument sidérés par l'ardeur du capitaine soviétique. Sachen'ka était littéralement déchaîné.
Mais le jeune capitaine britannique mit un terme à la discussion en un mot. De cette manière claire et sans équivoque pour laquelle les Britanniques sont connus, le capitaine
annonça : "Ecoutez, Monsieur le capitaine ! Je vis en Grande-Bretagne depuis déjà 30 ans et je suis incapable de comprendre ce qui se passe en Ulster. Oublions la politique et parlons
plutôt des femmes !" Eh bien Sachen'ka n'allait pas laisser passer cela ! Il connaissait tellement de blagues sur les femmes que les Britanniques ne pouvaient pas y croire. Comme je le
répète, ces derniers avaient une très bonne connaissance du Russe, ce qui facilitait bien les choses.
Pendant ce temps, les espions et l'officier politique en second continuaient à échanger des blagues sallaces près du chêne. Le stock d'histoires hautes en couleurs de ce dernier semblait inépuisable. Le capitaine anglais, le plus vif d'esprit, copiait ces histoires dans son gros carnet de notes. Les bois étaient remplis d'éclats de rires. Les intervenants commençaient à oublier la nature de la situation, qui détenait qui, qui gardait qui et ce qui se passait globalement. Certes, le major britannique indigné exprima son mépris pour les Américains à cause de leur mauvaise gestion dans l'élimination des déchets restants du programme Prêt-Bail, en pointant son doigt vers le ZIS (7). Plusieurs anecdotes sur le sujet suivirent avant de transitionner à nouveau vers le thème féminin. Le jour commençait à décliner. Sans attendre le groupe d'intervention, les Britanniques sortirent toutes sortes de provisions en boîtes, du pain, des saucisses, du fromage et même des oeufs ainsi que du café dans un thermos. Etant des gens bien éduqués, les Britanniques invitèrent le gardien. L'officier politique, comme une personne bien éduquée, ne refusa pas. Ils s'installèrent, mangèrent, fumèrent et échangèrent encore quelques histoires. Et ce capitaine britannique continuait à écrire et encore écrire. C'est à ce moment que sortirent silencieusement des bois quatre individus avec trois sacs et une pelle. Les Britanniques firent rapidement la relation entre le nombre de sacs et eux-mêmes et tentèrent d'en tirer une conclusion (ils étaient des officiers de renseignement, après tout). Leur mine déconfite amenait à penser aux paroles d'une chanson soviétique qui disait : "Et la Mère patrie ne sait pas où sont les tombes des héros." Quatre personnes gagnèrent silencieusement le chemin, saluèrent l'officier politique en second et montèrent dans la benne du ZIS pour ramasser le charbon. Les Britanniques étaient rassurés. L'officier politique expliqua crûment à l'adjudant ce qu'il en était de la mission militaire de liaison, comment il l'avait péniblement retenue, qu'il avait déjà passé presque une journée entière sur place, qu'il avait épuisé son stock de blagues et qu'il était nécessaire qu'il fasse son rapport à ses supérieurs ! L'adjudant, chargé de charbon, grommela calmement : "C'est clair, maintenant. Attendez" et il partit. Mais que faire des espions durant la nuit ? Bien que les vols étaient maintenant terminés, les Britanniques comprirent après le départ des charbonniers que quitter rapidement le site de détention n'était pas envisageable. Le major britannique commenta tristement : "Si j'avais su ! Nous et ce chêne ! Nous aurions eu le temps de le couper ! Et nous aurions mis notre véhicule en marche arrière pour vous laisser sur place." Les gens du KGB arrivèrent deux heures plus tard. Tous ceux "qui ne le sentaient pas" s'évaporèrent ! Le lendemain, un représentant de la Komendatoura se présenta. Il compila une déclaration précisant la violation de la zone interdite par la mission britannique. Le ZIS fut remorqué, libérant ainsi la "Jeep spéciale" et la mission étrangère fut escortée jusqu'à une route où la circulation lui était autorisée. En faisant ses adieux, le capitaine britannique déclara à l'officier politique en second : "Si je suis renvoyé de la mission à cause de vous, j'écrirai un recueil d'histoires sur les femmes russes." Le fameux ZIS fut tracté jusqu'au groupement de transport pour y être réparé. Deux réservoirs supplémentaires percés de Su-17 furant placés à l'arrière pour transformer l'engin en "lance-missiles !" Ils appelaient ça un "Pershing." Il servit de simulateur lors des entraînements en vol de notre régiment d'aviation. Sachen'ka et le chauffeur du ZIS furent récompensés. Je ne sais pas si le capitaine britannique écrivit le livre sur les femmes russes. En conclusion, je dirai une chose : si vous n'êtes pas impliqué dans la politique, les affaires ou le renseignement, occupez-vous des femmes - si vous avez le temps et le potentiel bien sûr. V.V.
notes
(1) L'origine des missions remonte à l'Article 2 de l'Accord sur le mécanisme de contrôle en Allemagne ("Agreement on Control Machinery in
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