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USMLM USMLM Bill Burhans a servi comme officier de renseignement avec l'Equipe Air (Air Team) de la USMLM de Juillet 1971 à Juin 1975. Il est revenu en 1979 pour commander le Détachement n°16 du 7113ème Escadron d'activités spéciales (soit l'Equipe Air), partant à regret au début du printemps 1980, après un désagréable incident commandité par les Soviétiques en Décembre 1979. Il nous relate ici une mission ciblée à Köthen qui donna d'excellents résultats.

L'Agence de renseignements de la défense (Defense Intelligence Agency - DIA) fonctionnait selon les priorités en matière de recherche d'informations. Cela impliquait des Besoins spécifiques de collecte de renseignements (Specific Intelligence Collection Requirements - SICR) qui étaient définis comme "Une lacune identifiée dans les informations détenues qui ne peut être comblée que par une action de collecte [de renseignement] et qui a été validée par l'autorité de contrôle appropriée." Les demandes étaient très spécifiques et permettaient aux opérateurs de se concentrer sur les éléments prioritaires. Au cours des quatre années qui se sont écoulées après mon départ de l'Equipe Air (Air Team) en 1975, j'ai été promu lieutenant-colonel et j'ai acquis plus d'expérience à des niveaux plus élevés au sein de la communauté du renseignement. J'étais maintenant bien informé sur ce qui était récueilli où, avec quel niveau de succès et par qui. J'ai pu évaluer ce que faisait l'Equipe Air vers 1979 et en tirer plusieurs conclusions. Mes principales préoccupations étaient ce que je percevais comme un manque de concentration et une duplication des efforts. Pendant les quatre années passées depuis mon départ de l'unité, le programme de ciblage prioritaire et secondaire que nous avions utilisé si efficacement au début des années 70 avait été abandonné. Au lieu de cela, les officiers en mission de reconnaissance avaient apparemment adopté une méthode de travail "au petit bonheur la chance."

Köthen

Les programmes de recueil de renseignement par satellite ou par d'autres moyens plus sensibles, assuraient une excellente couverture concernant les effectifs des régiments assignés à la 16è Armée aérienne soviétique ainsi que ceux de la Force aérienne est-allemande opérant dans l'espace aérien restreint au-dessus de l'Allemagne de l'Est. Il n'était vraiment pas nécessaire pour une équipe de reconnaissance de se rendre près d'un aérodrome afin de répertorier le nombre de machines et leur type alors que cela était déjà bien connu. Dans le même temps, il était impératif d'observer et de cataloguer les armements emportés, le nombre de pylônes d'armement montés sous le fuselage et sous les ailes sur des modèles d'avions spécifiques, ainsi que les tactiques d'attaque sur les champs de tir. Il était également nécessaire de prendre des photographies techniques en gros plan de systèmes d'armes présentant un grand intérêt de même que d'équipements particuliers afin de permettre leur identification et leur classification.

Pilots L'Equipe Air constituait un atout unique dans la communauté du renseignement américaine. Il n'y avait aucune raison de gaspiller cette chance en recherchant des d'informations déjà rassemblées avec succès ailleurs. Nous devions nous concentrer sur la collecte d'informations uniquement ou principalement accessibles à une source humaine sur le terrain, comme stipulé dans le SICR. J'ai ainsi mis sur pied ce que j'aimais appeler des "visites ciblées" (targeted tours). J'entendais par là l'assignation d'une cible hautement prioritaire à une équipe de reconnaissance pour leur voyage de deux jours, avec une tâche alternative si pour une raison quelconque, la mission principale ne pouvait pas être remplie. Les analystes de la section objectifs des opérations de l'Equipe Air (Targets Section of Air Team Operations) briefait de manière approfondie chaque officier et sous-officier de reconnaissance sur tous les aspects du SICR relatifs à chaque objectif figurant dans le dossier cible. J'ai décidé de donner l'exemple à mes troupes en leur montrant que je savais et comprenais ce que leur travail impliquait et ce qu'il fallait pour obtenir les résultats souhaités. J'ai examiné les besoins hautement prioritaires existants et choisi celui qui, à mon avis, pourrait être satisfait si la mission était planifiée correctement, si les conditions météorologiques étaient de la partie et si la situation sur le terrain évoluait favorablement. Le MiG-23ML "Flogger-G" était la cible que je choisis. La dernière version en date du chasseur-intercepteur MiG-23 à géométrie variable était équipée d'un système de recherche et de poursuite infrarouge (IRSTS - Infrared Search and Track System) amélioré (1) présentant un très grand intérêt pour les analystes de l'USAF de la section Technologie étrangère (Foreign Technology Division) du Air Force Systems Command. Les analystes avaient besoin de photographies de qualité technique en gros plan du capteur IRST monté sur le fuselage de l'avion, sous le nez devant la roue avant. Une bonne couverture permettrait de déterminer les spécifications du système. Ce qu'il fallait faire était très clair, tout comme le lieu où nous devions nous procurer les images nécessaires : l'aérodrome de Köthen, où de nouveaux "Flogger-G" avaient récemment été affectés au 73è Régiment d'aviation de chasse de la garde qui y était stationné.

Missiles Une personne qui faisait partie du Air Team au moment de mon départ en 1975 était toujours présente en 1979 : le sergent-chef Mert Pennock, un excellent sous-officier de reconnaissance expérimenté. Nous avions voyagé ensemble à plusieurs reprises dans le passé et une forte confiance mutuelle existait entre nous. Nous nous sommes penchés sur les demandes de renseignement du capteur IRST afin d'identifier exactement ce qui était nécessaire. Nous avons soigneusement étudié la carte à l'échelle 1:25.000 de l'aérodrome soviétique de Köthen afin de déterminer avec précision où nous devions être pour obtenir la couverture requise. Cet aérodrome était situé à environ 15 km à l'ouest du pont routier qui enjambait l'autoroute Berlin-Dresde à Thurland. Mon tour de service précédent m'avait appris qu'il s'agissait d'un objectif difficile à atteindre sans être repéré. Après avoir quitté la Maison de Potsdam très tôt le matin du 10 octobre 1979, Mert et moi avons longuement emprunté des itinéraires détournés pour nous rendre discrètement à environ 100 km au sud de Potsdam jusqu'à un point d'observation préliminaire (pre-OP). Nous étions légèrement au nord du village de Görzig sur le point culminant d'un champ. De nombreuses étendues agricoles se trouvaient dans cette zone située au sud de l'aérodrome. Il y avait beaucoup de champs de maïs utilisables pour cette pré-OP. Le maïs était suffisamment haut pour dissimuler complètement la Ford Bronco dans laquelle nous voyagions afin que nous soyons pratiquement invisibles. Nous avions un champ de vision de 360 degrés qui nous permettait de surveiller l'activité éventuelle de "mouchards" (les suiveurs de la Stasi). Nous étions arrivés à cet endroit avant les premières heures du jour et nous étions par conséquent plutôt sûrs que personne ne connaissait notre position précise, ni même que nous étions dans la région. Nous nous sommes installés pour attendre le début des vols. Comme le vent soufflait de l'ouest, nous étions confiants de pouvoir trouver la position optimale pour couvrir les vols que nous espérions voir se dérouler. Malgré un temps plutôt beau, il n'y a eu aucune activité perceptible pendant longtemps. Bien que nous soyons assez proches de l'aérodrome, nous n'avons perçu aucun bruit de moteur ni détecté d'autres signes encourageants. Finalement, nous avons entendu le son de ce qui était probablement un décollage. Apparemment, un programme de vol commençait. Tout à coup, surgit de nulle part, apparut un "Flogger-G" qui vira au-dessus de nous pour une courte approche tactique finale de l'aérodrome. Le moment était venu de se rapprocher de la cible.

PRA

L'aérodrome de Köthen se trouvait dans la zone interdite permanente (Permanent Restricted Area - PRA) de Dessau qui s'étendait à l'est et à l'ouest à plusieurs kilomètres des extrémités de la piste. Cependant, cette PRA était relativement étroite du nord au sud, ce qui signifie que nous pouvions nous rendre jusqu'à la clôture située à l'extrémité est de la piste si nous le souhaitions, tout en étant environ 5 km à l'intérieur de la zone interdite. Alors que nous nous dirigions vers le nord-est en direction d'Arensdorf pour nous rapprocher du terrain, nous avons évalué notre situation. Notre timing était apparemment parfait. Plus nous nous approchions d'Arensdorf, plus cela devenait évident : personne n'était dans les parages et personne ne savait même que nous étions dans la région. Il n'y avait pas de circulation sur la route 183 qui reliait les villes de Zörbig et Köthen. Les champs étaient fermes et nous offraient beaucoup d'espace pour courir. Bien que nous soyons à l'intérieur d'une PRA, de nombreuses voies d'évasion s'offraient à nous si le besoin s'en faisait sentir. Si nous étions confrontés à une tentative de détention à notre point d'observation, tout ce que nous devions faire était de nous rendre sur la route 183, puis de nous diriger vers le sud pour sortir de la PRA. Nous nous sommes rapidement rendus dans le petit village d'Arensdorf et nous sommes dirigés au nord de la ville dans un verger de pommiers (depuis disparu). Nous étions directement dans l'axe de piste sous les avions en approche, exactement où nous devions être. Un avion en finale allait bientôt passer à basse altitude au-dessus de nos têtes. Mert a arrêté le Bronco et j'ai sauté en tenant mon appareil photo Nikon F monté avec un objectif 1000 mm Nikor. J'ai pris plusieurs photos de cet appareil.

MiG-23ML MiG-23ML Nous étions à un kilomètre et demi du seuil de piste. Quelques minutes plus tard, un autre avion s'est dirigé vers nous. Etant donné qu'à ce stade, nous nous trouvions juste un peu à l'est de la balise d'approche interne (à environ 800 mètres de distance) au-dessus de laquelle les avions en phase d'atterrissage passaient à une altitude d'environ 100 mètres (325 pieds), cet avion serait proche de cette altitude au moment il nous survolerait. En utilisant le même téléobjectif, le capteur IRST a presque rempli le cadre. Il s'agissait maintenant de s'assurer que l'objectif était correctement mis au point et que l'image du capteur soit parfaitement claire et nette. Comme il n'y avait absolument personne autour de nous, nous avons décidé de nous rapprocher encore plus du bout de la piste. Nous nous sommes déplacés aussi loin que possible vers l'ouest en direction de l'extrémité de la piste, jusqu'à atteindre le talus du chemin de fer. Les rails courraient du nord vers le sud, juste à l'est et parallèlement à la clôture du périmètre de l'aérodrome. Le talus nous a protégés de la vue de l'aérodrome. Nous ne pouvions plus nous rapprocher, mais nous n'avions pas besoin de le faire. Les avions passaient très bas au-dessus de nous à ce moment-là, juste avant de se poser sur la piste. Nous étions si proches que j'avais le sentiment que j'aurais pu lancer une pierre et atteindre la piste en béton ! L'avion suivant était déjà bas alors qu'il approchait pour atterrir. A ce moment, j'alternais les objectifs, en utilisant du 180 mm ou du 500 mm. Il aurait été difficile de gâcher maintenant, car l'objectif de 180 mm était un équipement remarquable et très facile à mettre au point. Je me suis appliqué pour me placer directement sous l'avion afin de photographier le capteur IRST directement dans l'axe. En pensant à tout cela à présent, j'aurais aimé rester allongé sur le dos pour avoir un résultat encore meilleur, mais... Nous avons pris une demi-douzaine d'appareils supplémentaires, puis avons remballé et quitté les lieux, très confiants d'avoir la couverture dont nous avions besoin. A ce jour, je suis convaincu que personne ne savait où nous étions ni ce que nous avions accompli ! Les photographies obtenues étaient excellentes ! Une photo en gros plan plein cadre donnait une vue de face du capteur IRST dans son intégralité. Les analystes ont pu compter les différentes facettes présentes sur les trois faces du dispositif. Nous avons reçu une évaluation exceptionnelle de la part de la Defense Intelligence Agency et de la Foreign Technology Division, Air Force Systems Command pour cette couverture. Malheureusement, cette photo particulière n'a pas été sélectionnée pour figurer dans l'historique officiel déclassifié de 1979 de la USMLM. Ce qui est illustré ci-dessous en est une autre provenant de cette série et constitue la seule image du capteur IRST que je possède. Mais, il est certainement possible que l'autre partie aie eu vent de cette mission réussie. Il est même envisageable que cette action soit devenue la goutte d'eau qui a fait déborder le vase et incité les Soviétiques à prendre la décision de monter une opération pour se débarrasser de moi, ce qui a malheureusement été couronné de succès deux mois plus tard. J'aime à penser que les Soviétiques craignaient tellement mes compétences en matière de renseignement qu'ils ont veillé à ce que je sois viré de mon poste de commandement et réaffecté ailleurs qu'à la USMLM...
Pour connaître les circonstances de cette éviction, consulter le lien suivant en Anglais > Lien.

USMLM

notes

(1) Le capteur IR du MiG-23ML désigné TP-23M était une évolution du TP-23 monté sous le nez des MiG-23M "Flogger-B." Le modèle du "Flogger-G" avait trois panneaux translucides à l'avant, tandis que l'ancien TP-23 n'en avait que deux. Le TP-23M, associé au calculateur analogique AVM-23, permettait de tirer des missiles R-3S (AA-2 "Atoll"), R-23T (AA-7 "Apex") et R-60 (AA-8 "Aphid").


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